(Résumé de la conférence visio donnée par C.Ponsart directrice de l’unité de recherche des zoonoses bactériennes à l’Anses et le Professeur A.Fontbonne, Ecole Vétérinaire Nationale de Maison-Alfort du 7 juillet 2022).

Qu’est-ce que la brucellose canine ?

La brucellose canine est une maladie bactérienne causée par Brucella canis, un Coccobacille Gram négatif. La détection de cette bactérie est en forte expansion ces deux dernières années.

Les laboratoires Français nous informent d’une recrudescence des cas, passant de 2 cas déclarés en 20 ans à 5 cas en 8 mois.

Les chiffres semblent faibles, mais compte-tenu de la difficulté de diagnostic et d’isolement de cet agent pathogène, il est aisé de comprendre la sous-évaluation de sa représentation en France et en Europe en général.

 

La Brucellose regroupe des agents pathogènes différents, avec des souches dites rugueuses ou lisses.

Ainsi la Brucellose bovine à B.abortus, caprine à B.melitensis et porcine à B.suis sont des souches lisses, bien connues de ces filières, dont la surveillance est réalisée depuis des années par des tests de dépistages sérologiques fiables.

Pour le chien comme pour le mouton, infectés respectivement par B.canis et B.ovis, un polysaccharide rugueux est présent, ne permettant pas d’utiliser les tests des espèces précédentes.

 

Comment se transmet la Brucellose ?

Les voies de contaminations sont les muqueuses ou la peau lésée (lors de chirurgie obstétricale par exemple), par voie orale (lors de réanimation de chiots par exemple), contact avec la semence, par voie conjonctivale, et une voie de contamination aérienne a récemment été mise en évidence.

La réputation de maladie vénérienne du chien n’est donc pas représentative des nombreuses voies de contamination possibles, et doit donc être revue afin de prendre les mesures de protection nécessaires tant pour les animaux, que pour leur éleveurs et futurs propriétaires, et pour les vétérinaires.

La présence des bactéries dans des fœtus morts ou dans les pertes vulvaires chez la chienne (lochies ou chaleurs !) est estimée à 4 à 6 semaines.

La semence peut être contaminante jusqu’à 8 semaines après le contact infectant, et ainsi permettre la contamination d’autres chiennes et diffuser la maladie.

De récentes études démontrent la présence de B.canis dans les urines des animaux contaminés sur une période allant de 6 à 14 semaines.

Dans un environnement humide la bactérie peut survivre 4 mois. Par chance, elle est sensible à une désinfection usuelle.

 

La survie des nouveau-nés de chiennes brucelliques est possible. La bactérie est alors présente dans les urines des chiots.

Quels sont les signes d’infection par la brucellose du chien ?

Beaucoup d’individus atteints sont asymptomatiques, favorisant la dissémination au sein des élevages.

Le signe le plus fréquent est la spondylodiscite (atteinte des disques intervertébraux), tant chez le mâle que chez la femelle.

Chez les chiens reproducteurs, la brucellose entraîne :

        Chez les femelles : des avortements tardifs (J45-55) et des résorptions embryonnaires. La survie des fœtus brucelliques est possible.

        Chez le mâle : épididymite, prostatite, agglutination des spermatozoïdes (entraînant éventuellement une infertilité), une nécrose scrotale. Elle entraîne rarement une orchite.

D’autres signes généraux,  peu spécifiques sont possibles : fatigabilité, poils ternes, hypertrophie des nœuds lymphatiques en particuliers mandibulaires, myocardite, uvéite, méningite, dermatite pyogranulomateuse.

Comment savoir si mon chien est atteint de brucellose ?

Les méthodes diagnostiques disponibles sont de deux types :

  • Mise en évidence indirecte : 

La sérologie permet de voir si l’animal a été en contact avec la bactérie et a produit des anticorps dirigés contre elle. 

Elle permet le dépistage et le suivi des animaux, toutes les 4 à 6 semaines afin d’observer une éventuelle séroconversion.

Elle peut être faite en laboratoire ou à la clinique vétérinaire via un kit rapide.

Les limites de cette technique sont la non détection des chiens séronégatifs infectés et la présence de faux-positifs.

  • Mise en évidence directe :

        La bactériologie permet la mise en évidence de Brucella canis. Cependant, cette méthode est peu sensible et longue car la bactérie est fragile et pousse lentement (10 à 15 jours).

        La PCR permet la mise en évidence du matériel génétique de la bactérie suite à son amplification. Actuellement, les protocoles ne sont pas standardisés et il n’y a pas d’identification de l’espèce.

        Maldi-Tof-MS : identification par spectrophotométrie de masse. Là encore cette technique manque de spécificité car elle ne permet pas actuellement la différenciation des espèces rugueuses de Brucella et Ochrobactrum.

Ces différentes techniques sont donc limitées par la présence de faux-négatifs, ne permettant pas le diagnostic.

Selon le cas, il sera donc préférable d’opter pour l’une ou l’autre des méthodes disponibles :

        Animal symptomatique : sérologie et bactériologie en multipliant les prélèvements

        Animal asymptomatique : sérologie seule, puis bactériologie sur plusieurs prélèvements si le résultat est positif. 

Si l’infection est confirmée dans un élevage ou groupe de chiens, il faudra tester tous les animaux.

Que se passe-t-il en cas de confirmation de l’infection à Brucella canis ?

Dans le cadre d’une collectivité, le dépistage de tous les animaux doit être fait.

Les recommandations actuelles, et notamment dans le cadre de protection de la Santé Publique sont :

        L’euthanasie des animaux infectés. En effet, le traitement antibiotique n’est malheureusement pas possible à grande échelle, car il est coûteux, que son efficacité n’est pas bonne et la vérification du portage est presque impossible. 

        La stérilisation ET l’antibiothérapie, qui auront pour but de diminuer les symptômes et l’excrétion. Cependant, le risque de rechute et de transmission persiste.

Une bithérapie longue, à base d’antibiotiques de la famille des cyclines et d’aminosides (toxicité rénale nécessitant un suivi voire une hospitalisation le temps du traitement) de plusieurs semaines est recommandée à l’heure actuelle même s’il n’existe pas de consensus. 

L’animal devra être suivi avec une sérologie semestrielle à vie, car les rechutes sont possibles.

En cas de placement de l’animal, il devra se faire avec un consentement éclairé de l’adoptant compte-tenu du risque pour lui-même et ses proches.

Comment éviter la contamination par Brucella canis ?

Le risque zoonotique, les symptômes graves qui peuvent en découler tant pour le chien que pour les Humains (maladie et/ou infertilité, contagiosité), l’absence de guérison, font de la brucellose canine une maladie émergente très préoccupante.

A l’heure actuelle, il n’existe pas de vaccination possible.

La prophylaxie consiste donc principalement dans la surveillance et les précautions prises lors d’importation et de mise à la reproduction.

        La quarantaine d’un nouvel arrivant devrait être de 6 à 8 semaines, avec un test sérologique à l’arrivée (ou 3 semaines avant) et un second test à la 6ème semaine.

        Lorsque l’élevage canin réalise des expositions, des saillies extérieures, des échanges de lignées, il est recommandé de tester les reproducteurs tous les 6 mois.

        La désinfection classique éradique la présence de Brucella c. dans les locaux. Il est donc important de ne jamais baisser la garde, et si besoin de modifier son protocole de nettoyage/désinfection pour l’adapter aux différents agents pathogènes.

        Dans le cadre de la reproduction assistée par insémination et notamment les envois de semence canine réfrigérée ou congelée, un test sérologique 3 semaines avant le prélèvement est fortement encouragé, voire indispensable pour entrer dans certains pays.

Par l’ouverture des frontières, l’augmentation des imports de chiens avec des pays où elle est endémique (Pays de l’Est, Espagne notamment), l’émergence de la Brucellose canine est fortement préoccupante. 

Les conséquences qu’elle pourrait avoir sur une famille, ou sur l’activité professionnelle de ceux qui vivent pour et par le chien serait dramatique.

L’infection à Brucella canis faisait déjà partie des maladies à déclaration obligatoire, et des mesures Nationales peuvent être prises (Arrêté du 3 mai 2022 listant les maladies animales réglementées d’intérêt national en application de l’article L. 221-1 du code rural et de la pêche maritime)

Nos voisins Britanniques imposent maintenant une sérologie négative réalisée dans les 30 jours avant l’importation de chiens ou de semence.

Afin de diminuer le risque en élevage et d’être confronté à une situation dramatique  moralement et financièrement pour les professionnels de l’élevage canin, chacun se doit d’être rigoureux dans la prévention et le dépistage de la brucellose canine.

Le risque de croiser l’agent bactérien responsable de la Brucellose canine est croissant. Connaitre les voies de contaminations afin de prendre les précautions prohylactiques nécessaires est donc primordial afin de sécuriser son élevage.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à télécharger la fiche de l’Anses.

L’équipe de la clinique vétérinaire Be My Vet Avrillé se tient bien sûr à votre disposition pour répondre à vos interrogations sur ce sujet.